Retour

Cérémonie commémorative du 29 avril 2018

Célébration de la journée du souvenir aux victimes et aux héros de la déportation

Allocution de M. François-Xavier PRIOLLAUD

Maire de Louviers
Dimanche 29 avril 2018

Seul le prononcé fait foi

Monsieur le Conseiller départemental,
Mesdames et Messieurs représentant les Autorités civiles et militaires,
Madame et Messieurs les Présidents d’associations patriotiques,
Madame et Messieurs les porte-drapeaux,
Mesdames et Messieurs,

Nous sommes réunis ce matin pour nous souvenir des victimes et des héros de la déportation.

Depuis la loi du 14 avril 1954, le dernier dimanche d’avril est en effet consacré au souvenir des victimes de la déportation et morts dans les camps de concentration du IIIe Reich. J’ai souhaité, depuis mon élection, qu’une commémoration se tienne désormais chaque année à Louviers.

Il y a 73 ans prenait fin la seconde guerre mondiale et avec elle l’horreur des camps de la mort. Mais on oublie souvent que les premiers camps virent le jour bien avant le début de la guerre, dès l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Dachau ouvre le 21 mars 1933. Les nazis y internent les opposants au régime, ceux qu’ils qualifient d’« asociaux », tous ceux qui n’entrent pas dans les normes national-socialistes.

Ce qui va changer avec la guerre, c’est la dimension nouvelle et effroyable que prend le système concentrationnaire.

On ne déportait pas que pour les idées :il n’y avait pas que des communistes, des résistants ou des défenseurs de la démocratie dans les camps, il y avait aussi ceux qui étaient simplement là pour ce qu’ils étaient et non pour ce qu’ils avaient fait : étoiles jaunes pour les juifs, triangles roses pour les homosexuels, triangles noirs pour les indésirables (africains, tziganes ou handicapés mentaux).

Quand, en 1941, les nazis décident de mettre en œuvre la « solution finale », c’est l’extermination de 11 millions de juifs qui est froidement planifiée et méticuleusement organisée, jusque dans les moindres détails. La déportation n’a pas eu seulement pour objectif ou pour effet l’éviction d’une population d’un territoire, mais sa destruction physique et culturelle. Les camps ont été faits pour concrétiser un génocide. Le génocide, c’est la logistique de l’extermination.

Mesdames et Messieurs,

Quand on évoque la déportation durant la seconde guerre mondiale, ont fait référence à des millions de victimes. La masse des victimes ne doit jamais nous faire oublier que derrière chacune d’entre elles, il y avait un homme, il y avait une femme, il y avait un enfant. Tous innocents. Que cette journée du souvenir nous permette de rendre à chacune des victimes de l’Holocauste l’humanité que leurs bourreaux avaient décidé de leur confisquer. Que cette journée du souvenir rétablisse leur dignité déchue.

Mais le souvenir ne suffit pas. Il doit nous aider à comprendre. Parce que « le souvenir commence avec la cicatrice », il nous invite à comprendre comment et pourquoi c’est l’Europe, le continent des Lumières, qui a plongé l’humanité dans la nuit et dans le brouillard.

Comprendre comment et pourquoi les démocraties ont été si faibles au point de se résigner.

Et aujourd’hui, Comprendre comment et pourquoi, « le passé vit plus que jamais dans le présent », pour reprendre des mots d’Elie Wiesel.

Mesdames et Messieurs,

A l’occasion du discours qu’il a prononcé mercredi devant le Congrès des Etats-Unis d’Amérique, le Président de la République a cité Théodore Roosevelt rappelant que « la liberté n’est jamais qu’à une génération de l’extinction ».

Ensemble, réveillons nos consciences pour ne pas être la génération de l’extinction. Car chaque jour qui passe vient nous rappeler que la bête immonde n’est pas morte. Elle épouse les formes de son époque, mais elle n’est pas morte.

Le terrorisme de masse a investi notre quotidien.
L’antisémitisme n’a pas disparu et vous me permettrez d’associer à cette journée du souvenir la mémoire de Madame Mirelle Knoll, rescapée des camps et sauvagement assassinée dans son appartement parisien il y a quelques semaines au seul motif qu’elle était juive. Cela s’est passé en France, en 2018.

Comme Simone Veil disparue l’an dernier, Mireille Knoll avait passé sa vie à témoigner, à raconter l’indicible. Chaque année, notre région, la Normandie, organise avec le Mémorial de la Shoah, le déplacement de lycéens au camp d’Auschwitz-Birkenau en présence de rescapés. Cela remplace tous les livres d’Histoire.

Mesdames et Messieurs,

Pour que l’Histoire ne bégaie pas, le temps est venu de l’engagement. Ne laissons pas se déliter ce que la communauté internationale a patiemment construit depuis la fin de la 2de guerre mondiale.

Face à la tentation de l’unilatéralisme, gardons le cap du multilatéralisme ;
Face à la tentation du repli identitaire, gardons le cap d’une Europe qui unit ;
Face à la tentation du protectionnisme, gardons le cap des libertés ;
Face à la tentation de la force, gardons le cap du droit et de la justice internationale.

Avant-nous, d’autres ont renoncé. Ne commettons pas les mêmes erreurs. Engageons-nous pour les générations futures et gardons en mémoire ce que nous disait le poète juif allemand Paul Celan : « Il y a encore des chants à chanter au-delà des hommes ».

Vive la République et Vive la France !