Dessiner au Musée
Pourquoi venir dessiner au musée ?
… ou le dessin comme une autre écriture, une respiration libérée et libératrice.
Ici, l’intention est de considérer la pratique du dessin comme n’importe quelle autre pratique abordée au cours de la scolarité. Comme lire, écrire, compter, s’exprimer à l’oral ou à l’écrit, courir, nager…
Autant d’apprentissages considérés incontournables dans le parcours scolaire ordinaire et ce dans le cadre d’une pratique récurrente.
Venir dessiner au musée, le lieu est essentiel car il emmène au cœur du sujet même. Bâtisse majestueuse de 1888, dédiée dès son édification aux arts. Le ton est donné, le cadre est posé… « Une invitation au voyage ».
Dessiner ne fait clairement pas encore partie des savoir-faire inscrits au registre des « indispensables »…et pourtant.
Cet exercice consiste à se poser, à observer le monde qui nous entoure et à le retranscrire dans un souci de représentation mais cette fois grâce à un autre mode d’expression que celui du langage.
Alors un nouvel « outil » entre en scène pour re-dire , « dire » autrement le monde : le dessin. La question dès lors n’est pas de savoir ou de ne pas savoir dessiner mais juste de Dessiner comme on chantonne, on compte, on court… Le principe au musée étant de considérer tout comme sujet… tout comme prétexte à dessiner.
Les œuvres exposées, mais aussi l’architecture intérieure/extérieure du lieu, son mobilier, ses détails, les textures des matériaux, ses espaces verts… les élèves aussi pour un jour deviennent « modèles vivants »…
Dessiner c’est d’abord se rassembler
Se rassemble avec soi-même, autour d’un axe indispensable à tout apprentissage : la concentration. Ensuite tout se passe entre le regard et la main/bras. La posture s’impose : se tenir droit car notre corps est notre premier référent de symétrie. La respiration se fait basse, les épaules descendent, le dos est droit. Alors le silence se fait naturellement, condition nécessaire à ce moment particulier où le corps et l’esprit sont en adéquation.
Dessiner c’est aussi apprendre à regarder, de près, de loin, sous tous les angles, changer de point de vue pour mieux analyser la structure du sujet à représenter. Pour mieux le comprendre, mieux l’appréhender dans sa spécificité. Sans à priori. Sans jugement. Tendre vers le regard neutre qui participe à l’apprentissage de la tolérance vis-à-vis de tout ce qui n’est pas « soi ».
40 minutes tous les 15 jours
Dessiner, 40 minutes, tous les quinze jours au musée ne s’inscrit pas dans le registre des savoir-faire mesurables ou évaluables, seule l’évolution du dessinateur face à son propre cheminement compte. D’où le choix du cahier de dessin qui raconte page après page le parcours de chacun.
Dessiner c’est convoquer le retranchement, c’est être capable de se « couper » de son environnement et ses contingences pour être pleinement à ce que l’on fait.
Si dessiner c’est tenter de re-dire le monde qui m’entoure, c’est par le même temps exprimer un peu de soi-même, par le prisme de cette tentative de restitution d’une altérité. En d’autres termes c’est aussi utiliser le sujet regardé pour laisser s’exprimer le sujet regardant à son insu. Le libérer.
Plus jamais je n’entends « oui mais je ne sais pas dessiner, je vais rater » car ici « dessiner c’est juste être en train de dessiner !!! » ✏️
Isabelle Aubert, médiatrice culturelle au musée de Louviers
Cette pratique calme, apaise et devient peu à peu un révélateur du jardin intérieur de chacun. Séance après séance les craintes, les appréhensions, les tensions, le manque de confiance en soi s’amenuisent laissant place au geste pur dans une concentration pleine, joyeuse et détendue.
